La Directive OMNIBUS est un ensemble de textes qui vise à renforcer la protection des consommateurs contre des pratiques commerciales trompeuses ou déloyales.
Elle est entrée en application en 2019 en droit européen. Elle a été transposée en droit français par l’Ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 avec entrée en vigueur le 28 mai 2022.
En 2020, le Conseil National de la Consommation (CNC), organisme consultatif présidé par le ministre chargé de la consommation, avait eu la bonne idée de consulter des experts en Revenue Management pour mieux comprendre les enjeux du Yield et notamment du pricing dynamique avant la transposition en droit français. Et dans sa grande sagesse, ce même CNC avait eu la très bonne idée d’interroger N&C parmi les experts consultés.
Plusieurs éléments sont à retenir sur cette directive OMNIBUS :
Pricing Dynamique
Le principe de « Tarification Dynamique », présent dans le texte européen, n’a pas été transposé et aucune règlementation spécifique ne vient encadrer sa pratique en tant que telle, malgré l’avis de N&C et de nos confrères consultés.
Prix saisonnalisés
Pour ceux qui s’inquiètent et qui nous en ont fait part, rassurez-vous, le fait d’avoir des prix saisonnalisés, c’est-à-dire différents par date de séjour, n’est pas interdit par la Directive Omnibus. La pratique des prix barrés est encadrée, mais elle consiste à regarder l’historique des prix pour une date de séjour donnée, elle ne consiste pas à comparer les prix d’une date de séjour avec ceux des dates précédentes.
Affichage du prix
L’Article 2 vient durcir les conditions d’affichage du prix en cas de promotions, notamment sur l’usage abusif des prix barrés. Le législateur impose dorénavant que le prix de référence soit « le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant l’application de la réduction de prix ».
L’idée est d’interdire de barrer des prix qui auraient été artificiellement augmentés sur un passé proche, car l’on soupçonne alors que la hausse tarifaire n’a été qu’un prétexte fallacieux utilisé uniquement dans le but de pouvoir afficher un discount sur ce nouveau prix élevé.
Il y a deux exceptions à cette règle :
- Le texte précise immédiatement après que « [cette disposition] ne s’applique pas aux annonces de réduction de prix portant sur des produits périssables menacés d’une altération rapide », sans préciser ces notions. Depuis au moins 30 ans, une semaine de location en Mobil Home, un billet d’avion, une nuitée hôtelière sont considérés par la puissance publique comme des produits périssables, autorisant les professionnels du Tourisme à pratiquer très librement des remises de toutes sortes. Cependant, il semblerait que la notion d’altération rapide soit, dans l’esprit de la loi, réservée aux consommables de l’alimentation quotidienne (yaourt, fruits…). Ainsi, l’usage des prix barrés entre bien dans le champ d’application du Yield.
- L’article 6 bis de la Directive Européenne prévoyait que les États membres pouvaient prévoir le cas de l’Early Booking progressif, sans le désigner comme tel : « Les États membres peuvent prévoir que, lorsque la réduction de prix est progressivement augmentée, le prix antérieur désigne le prix sans réduction avant la première application de la réduction de prix ».
Sur une date de séjour donnée, les prix n’ont pas à être comparés aux prix des séjours des 30 jours précédents. Par exemple on ne compare jamais le prix de la nuitée du 16/07 (210€) avec celle du 8/07 (190€).
On peut par exemple faire une remise le 16/07 de 210€ à 200€ en prix barré, indépendamment du prix pratiqué le 8/07 à 190€. Les prix peuvent être saisonnalisés, ce n’est pas contraire à la directive Omnibus.
Pour chaque date de séjour, la directive Omnibus amène à regarder l’historique de son prix sur les 30 derniers jours.
Sur la date du 8/07, le prix passe de 220€ à 190€ à J-7. Le prix peut être barré : 220€ à 190€ car le prix le moins cher des 30 derniers jours était bien à 220€.
Mais sur la date du 16/07 avec une baisse de prix à J-7, on ne peut pas afficher : 240€ à 210€ car le prix le moins cher des 30 derniers jours était à 210€ et non 240€.
Voici l’extrait de l’Article 6 bis (Directive Européenne) :
- Toute annonce d’une réduction de prix indique le prix antérieur appliqué par le professionnel pendant une durée déterminée avant l’application de la réduction de prix.
- Le prix antérieur désigne le prix le plus bas appliqué par le professionnel au cours d’une période qui n’est pas inférieure à trente jours avant l’application de la réduction de prix.
- Les États membres peuvent prévoir des règles différentes pour les biens susceptibles de se détériorer ou d’expirer rapidement.
- Lorsque le produit est commercialisé depuis moins de trente jours, les États membres peuvent également prévoir une période plus courte que celle prévue au paragraphe 2.
- Les États membres peuvent prévoir que, lorsque la réduction de prix est progressivement augmentée, le prix antérieur désigne le prix sans réduction avant la première application de la réduction de prix.
Voici l’extrait de la transposition d’Omnibus dans la loi française, parue au Journal Officiel (Ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021 transposant la directive 2019/2161 du Parlement européen et du Conseil du 27 novembre 2019 et relative à une meilleure application et une modernisation des règles de l’Union en matière de protection des consommateurs) :
Après l’article L. 112-1 du même code, il est inséré un article L. 112-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 112-1-1. – I. – Toute annonce d’une réduction de prix indique le prix antérieur pratiqué par le professionnel avant l’application de la réduction de prix.
«Ce prix antérieur correspond au prix le plus bas pratiqué par le professionnel à l’égard de tous les consommateurs au cours des trente derniers jours précédant l’application de la réduction de prix.
«Par exception au deuxième alinéa, en cas de réductions de prix successives pendant une période déterminée, le prix antérieur est celui pratiqué avant l’application de la première réduction de prix.
Certaines entreprises font usage d’un Early Booking progressif. Cette exception mentionnée à l’Article 2 est faite pour elles. Il s’agit d’un Early Booking valable par définition dès l’ouverture des ventes, avec une succession progressive de remises. Par exemple : -30% jusqu’à J-180, puis -20% jusqu’à J-120, puis -10% jusqu’à J-90. Dans ce schéma, le prix barré reste autorisé par rapport au prix public tel qu’il sera à l’expiration de l’Early Booking. Et ce même si, à chaque instant, le prix réel le plus bas affiché sur les 30 derniers jours n’est pas ce prix public de référence précisément à cause de la progressivité de l’Early Booking.
Transparence des prix
L’Article 6 encadre davantage l’information à donner au client sur la compréhension du prix lorsqu’il s’agit d’un prix « personnalisé » : « Le professionnel fournit au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes (…) : l’application d’un prix personnalisé sur la base d’une prise de décision automatisée, s’il y a lieu (…) ».
Ce schéma n’entre pas en contradiction avec le Pricing Dynamique, qui n’est pas un prix « personnalisé », mais au contraire une pratique de variation de prix qui s’applique au plus grand nombre, et notamment à tous les clients de la vente directe.
En revanche, s’il advient qu’un prix soit construit sur la base d’un profilage du client (âge, historique d’achat sur internet, etc.), amenant à un prix pour Jacqueline différent de celui de Paul pour le même produit, acheté au même moment, alors l’algorithme de proposition du prix doit être explicité. Ajoutons que ce n’est pas forcément une bonne pratique tarifaire. Le Pricing s’adresse à des segments de demande bien constitués, pas à des individus selon leur profil propre.
Pratiques trompeuses
Pour le reste, et de façon moins contraignante, le code de la consommation et le code du tourisme continuent de s’appliquer sur tous les métiers de l’hébergement (HPA, hôtellerie, résidences de tourisme…), interdisant les pratiques trompeuses ou déloyales et obligeant à une certaine information tarifaire.
Ainsi, à l’entrée de chaque établissement, doivent être affichés, de manière claire et lisible, les prix TTC des prestations de services. Les prix sont libres mais doivent être affichés. Pas nécessairement le prix du jour, mais par exemple les prix min et max de la saison.
Un autre exemple de pratique trompeuse à bannir est celui des faux avis : L’Article 3 stipule dans son alinéa 28 l’interdiction suivante : « (…) diffuser ou faire diffuser par une autre personne morale ou physique des faux avis ou de fausses recommandations de consommateurs ou modifier des avis de consommateurs ou des recommandations afin de promouvoir des produits. »
C’est du bon sens, mais le législateur a raison de le préciser.
Enfin, sans préciser là encore ce qui est « raisonnable », le code de la Consommation, dans sa Section 1 : Pratiques commerciales déloyales, formule en son Article L121-4 cette interdiction :
« De proposer l’achat de produits ou la fourniture de services à un prix indiqué (…) pendant une période et dans des quantités qui soient raisonnables compte tenu du produit ou du service, de l’ampleur de la publicité faite pour le produit ou le service et du prix proposé ».
Cette disposition concerne en particulier les remises alléchantes qui ont des quantités trop limitées. Afficher « à partir de 199€ » ou « offre incroyable jusqu’à -50% » et n’offrir que 2 séjours à ces niveaux de prix ou de remise relève de la tromperie. La jurisprudence semble indiquer que « des quantités raisonnables » sont avérées dès lors que le stock en promotion ou en prix bas représente environ 10% du stock total.
Dans l’exemple, une communication forte du type « offres exceptionnelles de -20% du 1er Mai au 4 Septembre sur une sélection de dates » est valide, car 11% du stock est en promo.
En revanche, une communication forte disant : « -20% sur une sélection de dates de Juillet-Août » n’est pas valide car 4% du stock seulement est en promo.
Conclusion
La loi Omnibus va dans le sens d’un assainissement des pratiques, sans pour autant interdire la pratique du Yield Management. C’est une bonne chose.
Les prix peuvent être saisonnalisés, ils peuvent être soumis au pricing dynamique, les Early Booking de toutes sortes peuvent être utilisés.
Attention toutefois, la DGCCRF a des antennes départementales qui peuvent interpréter différemment les textes d’un département à un autre. Nous avons eu des remontées terrain sur des cas d’interprétations différentes de la DGCCRF lors de contrôles sur l’affichage des prix dans des campings. Les deux départements concernés ont fait des recommandations différentes (pour l’un, le prix min et le prix max suffisait, pour l’autre non, il fallait afficher le prix du jour).
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