Dans un article paru dans Voyage d’Affaires, en ligne le 28 janvier, Florent Guillemin livre un compte rendu du 1er rendez-vous du Carrefour des Experts 2019. Il aborde ce qu’il appelle le « yield management inversé », c’est-à-dire les opportunités de marché post-réservation. Comme nous le ferons dorénavant pour faire progresser le débat, ou livrer nos convictions parfois discordantes, voici notre vision sur ce sujet qui touche à l’essence même de notre métier.
Le pilotage des prix est devenu de plus en plus aléatoire
Le yield avait imposé ses règles depuis près de 25 ans : les prix augmentaient au fur et à mesure que se rapprochait la date du voyage. Mais avec l’arrivée des opérateurs low cost et l’intensification du suivi de la concurrence, les règles ont changé : les compagnies traditionnelles ont commencé à faire varier leur prix de façon plus désordonnée, notamment à la baisse. Et les loups sont entrés dans la bergerie.
Les big data seraient la réponse mais on ne se pose plus les bonnes questions
Les professionnels du yield management – que nous sommes – ont conçu des outils de plus en plus sophistiqués, dopés aux data dont l’explosion a révolutionné notre métier. Mais en intégrant de plus en plus d’informations, on a perdu la maîtrise des solutions, ce qui a amplifié le désordre dans la gestion tarifaire et les fréquences de baisses des prix.
Des startups ont reniflé l’odeur du sang
Elles s’appellent Yapta, TripBam ou FairFly et ont bâti leur business sur cette promesse : vérifier jusqu‘au départ si un meilleur prix est possible et saisir toutes les opportunités pour lancer des cancel-rebooks. Comme les startups nées à la suite des délogements dus au surbooking, elles profitent des failles du système pour optimiser le prix d’achat des voyageurs.
Les compagnies aériennes dégainent leur 49.3
Attaquées de toute part, les compagnies aériennes se sont mises à détricoter ce qu’elles avaient mis vingt ans à construire : la suppression des intermédiaires.
Elles avaient réussi à mettre les Agences sous contrôle avec la commission à taux 0 en 2005. Puis s’étaient attaquées aux GDS (Amadeus, Galileo, Sabre ou Worldspan) qui capturaient une part jugée exagérée de leur marge, en migrant vers des solutions de distribution mieux maîtrisé grâce aux NDC (New Distribution Capability). Mais voilà que d’autres acteurs, d’une autre nature, prennent leur place et s’immiscent dans le processus de réservation.
Trois solutions pour réinstaurer la paix des ménages
Premièrement, on revient aux fondamentaux. Le pricing ascendant est la règle de base de notre métier : le prix des billets flexibles ne devra plus baisser dans la durée, quoi qu’il arrive, sinon on prend le risque du cancel-rebook : les clients qui ont acheté leur billet au prix fort – et qui permettent à la compagnie de gagner de l’argent – l’annulent pour en racheter un à prix cassé pour remplir l’avion.
Ensuite on continue de segmenter. Heureusement ces phénomènes ont été largement anticipés avec une multitude de tarifs différents en fonction des habitudes et des typologies de client.
Dans la réalité, seuls les tarifs non flexibles pourront baisser puisqu’ils ne sont pas échangeables ni remboursables.
Et enfin, on s’adapte. La finalité c’est d’éviter qu’un client passe d’un tarif flexible à une offre plus avantageuse non flexible. Donc si les prix des tarifs non flexibles doivent baisser, ce ne doit pas être trop près du départ. Ou alors avec certaines conditions tarifaires qui empêchent les hommes d’affaires de s’y glisser : passer au moins quatre nuits sur place (Mini Stay) ou celle du samedi soir (Sunday Rule)…
Notre métier est passionnant car il est en perpétuelle mutation. Plus que jamais, gardons la tête froide pour rester des acteurs performants d’un inévitable changement.
Mots-clés : Yield, Big Data, Startups, Pricing, tarifs